État et religions en Inde

Le plus important en quelques mots

L'Inde est un pays de 1,4 milliard d'habitants (en 2021), l'un des plus peuplés du monde. La diversité géographique du pays, les écarts de richesse et les inégalités de développement laissent déjà transparaître des difficultés de gouvernance. L'union de l'Inde est fragile, et la question religieuse est au premier plan dans un pays qui officiellement ne reconnaît pas de religions, mais où les minorités peinent à trouver un espace d'expression.

Jalon 1 : État et religions, sécularisme et dimension politique de la religion

L'Inde, un état jeune

Au XVIIe siècle, les Britanniques débutent leur colonisation de l'Inde. Cette colonisation s'étend sur plus de 300 ans, puisqu'il faut attendre 1947 pour que l'Inde obtienne son indépendance, sous le fait notamment de la désobéissance civile prônée par Gandhi. De là s'ouvre la question du partage des territoires et de l'héritage culturel des Britanniques : il faut reconstruire une identité indienne, accepter le partage du territoire avec le Pakistan, nouvel Etat créé également par le retrait des Britanniques, et s'appuyer sur des symboles et des modèles nouveaux pour construire ce nouveau pays.

La diversité religieuse du territoire

L'Union indienne croît et pratique majoritairement la religion hindoue, une religion polythéiste. À l'ouest, le Pakistan est majoritairement musulman, alors qu'au Nord-Est, la frontière avec la Chine amène la présence de la religion bouddhiste.

En Inde, on dénombre néanmoins près de 15% de musulmans qui tentent de pratiquer librement leur religion. Devant la diversité religieuse observée et les conflits récurrents depuis l'indépendance, entre le Pakistan et l'Inde notamment, le pouvoir politique tente d'instaurer un modèle laïque. Après de nombreux flux migratoires observés entre les deux pays, les dirigeants reconnaissent la nécessité de laisser libre-cours à la pratique religieuse des uns et des autres. Ainsi, on espère ainsi conserver une unité indispensable au bon fonctionnement du pays. Cette laïcité repose effectivement sur la liberté de pratiquer une religion, y compris chez les représentants politiques : les ministres peuvent participer à des cérémonies de culte auprès des fidèles.

Jalon 2 : Les minorités religieuses

Un tournant nationaliste marqué

Depuis 2014, c'est un parti nationaliste hindou qui gouverne le pays, avec le premier ministre Narendra Modi au pouvoir. Ce parti, créé en 1980, ne remet pas en cause le sécularisme à la tête de l'État. Néanmoins, des actions de violence sont à signaler dans les différents états (l'Inde est conçue comme un État fédéral). Plus de trois quarts des États, donc du territoire, sont aujourd'hui administrés par le Bharatiya Janata Party (BJP). Certains dirigeants considèrent que les musulmans ne peuvent pas constituer des citoyens, et s'appuient sur des traditions et des mythes (le culte de la vache notamment) pour décrédibiliser la religion musulmane. Face à cette situation locale dans les différents états, le gouvernement central est accusé de fermer les yeux.

Des minorités à protéger

Les minorités religieuses, qu'elles soient chrétiennes ou musulmanes, subissent donc des violences. L'armée intervient dans certaines parties du territoire pour protéger les lieux de culte. Mais parce que les musulmans sont sous-représentés dans les institutions, on peut craindre que cette protection ne tienne pas. La question religieuse est particulièrement marquée dans la région du Cachemire, qui au-delà d'être une région à fortes ressources, est l'une des seules régions indiennes où les musulmans sont majoritaires : une région ainsi considérée comme problématique pour les nationalistes hindous.

Si l'on ne peut pas parler à l'heure actuelle d'une persécution organisée envers les minorités religieuses, l'augmentation du nombre d'actes criminels envers les musulmans et les chrétiens indiquent en tout cas un tournant dans l'intolérance religieuse en Inde.

Jalon 3 : Des enjeux politiques, l'Inde et le Pakistan

La région du Cachemire, terre musulmane

La région du Cachemire se situe à l'ouest de l'Inde : elle est enclavée entre l'Inde et le Pakistan, et constitue un endroit majoritairement peuplé de musulmans. Le découpage administratif offre une partie du territoire aux deux pays : le Pakistan règne sur la partie ouest, l'Inde sur la partie est. Mais avec la tradition hindoue et le volet nationaliste de l'Inde, les musulmans du Cachemire se ressentent de moins en moins sous la gouvernance indienne. La question religieuse bascule dans la question politique, les musulmans réclamant de plus en plus leur rattachement au Pakistan.

Des conflits récurrents

Au moment du retrait britannique et du découpage des territoires, un premier conflit oppose l'Inde et le Pakistan, dès 1948. Le Cachemire, s'il avait initialement revendiqué son attachement au Pakistan, est plus divisé qu'il n'y paraît. La ligne de contrôle qui sépare la région du Cachemire au profit des deux états (un de chaque côté !) persiste encore aujourd'hui. Dans les années 1980, les mouvements indépendantistes se multiplient dans la partie indienne du Cachemire, et attisent la défiance de l'armée indienne. 50 000 personnes sont abattues, dont énormément de civils, pendant la "sale guerre", surnom donné à la période des années 1990 dans laquelle l'armée indienne se mobilise massivement pour conserver la mainmise sur la région du Cachemire, et étouffer les oppositions indépendantistes.

Une région convoitée pour ses ressources

La question religieuse n'est néanmoins qu'une partie du problème dans la région du Cachemire. La fertilité des terres fait de la région un espace agricole convoité. Les ressources hydriques sont nombreuses (fleuves) et les différentes puissances tentent de construire des barrages, permettant autant de contrôler les flux d'eaux que de produire de l'énergie hydro-électrique. Cette question des ressources attire d'ailleurs de nouvelles convoitises : la Chine conteste aujourd'hui sa frontière avec l'Inde et occupe une partie du territoire au Nord-Est de la région. Sur la question hydraulique, la Chine apporte son soutien au Pakistan, comme pour déstabiliser l'Inde, leur grande puissance concurrente en Asie.

La situation complexe au Cachemire