Les frontières en débat
Le plus important en quelques mots
Les frontières sont en constant mouvement. Qu'elles soient tracées par négociation ou par la guerre, elles peuvent susciter des frustrations et des remises en cause, entre plusieurs pays cherchant à défendre leurs intérêts. Au-delà de la démarcation des territoires, tu vas aussi aborder dans ce chapitre une nouvelle problématique : comment fixer un droit de la mer et attribuer les eaux à tel ou tel territoire ?
Jalon 1 : Reconnaître la frontière, la frontière germano-polonaise de 1939 à 1990, entre guerre et diplomatie
La Pologne, un pays coincé entre les grandes puissances
La Pologne fait l'objet, dès le Xᵉ siècle, d'une sans-cesse redéfinition de ses frontières. Si l'État tente de se structurer comme d'autres pays baltes, le pays est surtout encerclé entre l'Allemagne à l'ouest, et à la Russie à l'est, deux grandes puissances revendiquant chacune un étalement territorial.
C'est finalement la fin de la Première Guerre mondiale qui donne à la Pologne un véritable dessin de ses frontières : le traité de Versailles de 1919 oblige les États vaincus à reconnaître le nouvel État polonais.
Le pacte germano-soviétique de 1939, qui lie l'URSS de Joseph Staline et l'Allemagne d'Adolf Hitler, écrase totalement la Pologne. Le pays est envahi par le IIIᵉ Reich en septembre 1939, qui constitue le départ de la Seconde Guerre mondiale. La Pologne comme État disparaît totalement.
La Pologne depuis 1945, entre reconstruction et affirmation de ses frontières
La conférence de Potsdam, le 2 septembre 1945, tente de réorganiser l'Europe à la suite de la Seconde Guerre mondiale. À l'est de la Pologne, les fleuves d'Oder et de Neisse servent de frontière "naturelle" entre la RDA (Allemagne de l'Est) et la Pologne. Cette frontière est même décrite comme "frontière de la paix" par les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale.
La constitution d'un nouvel État polonais ne se fait néanmoins pas sans conséquence pour les populations : entre le redécoupage de l'Allemagne elle-même, et la crainte d'une influence soviétique forte sur la Pologne, des millions d'Allemands quittent la Pologne pour fuir vers l'ouest.
Néanmoins, la frontière germano-soviétique telle qu'elle est tracée est jugée indispensable tant pour la Pologne, que pour la reconstruction de l'Allemagne. Les historiens estiment que la réunification ne pouvait être possible que si chaque territoire était bien délimité. La réunification de 1990 ne remettra d'ailleurs plus ces frontières en cause : l'intégrité territoriale de l'Allemagne et de la Pologne sont reconnues, tout comme la présence et l'acceptation d'une minorité germanophone en Pologne.
Jalon 2 : Dépasser les frontières, le droit de la mer
La conférence de Montego Bay, la fixation d'un droit international sur les eaux
En 1982, la conférence de Montego Bay tente de donner un cadre à l'exploitation des mers et des océans. En plaçant sous souveraineté, donc sous propriété, une partie des mers et des océans, elle apporte aux États des droits, mais également des devoirs. Outre la liberté de navigation, la conférence de Montego Bay apporte la notion de zone économique exclusive (ZEE) qui donne aux États un droit d'exploitation de 370 km au-delà des côtes terrestres. Cela signifie que dans cette zone, les ressources qui peuvent être exploitées, celles de la pêche, celles des hydrocarbures également, font l'objet d'une organisation et d'une gestion par l'État souverain.
La ZEE française
La conférence apporte néanmoins des obligations, comme celles de lutter contre le trafic en mer, et celle de protéger les mers et les océans. Sur ce dernier point, de nouveaux textes sont en discussion et en négociation dans la période récente, en attente d'une promulgation et d'une reconnaissance formelle des pays qui s'engageraient à mettre en œuvre plus de moyens pour préserver les ressources naturelles maritimes.
Des limites et des libertés d'interprétation dans le droit de la mer
Ce droit de la mer laisse néanmoins des "zones grises", c'est-à-dire des espaces où le droit international peine à s'affirmer, car il est incomplet. D'abord, il est évident que les zones économiques exclusives se chevauchent, et mènent à des conflits dans l'exploitation des ressources, notamment sur la pêche. En Europe, le Brexit a également ramené la question du partage des eaux séparant la France et le Royaume-Uni, menant même parfois à des conflits en mer entre les pêcheurs.
Aujourd'hui, un pays comme la Chine tente de "jouer" avec ce droit de la mer pour étendre sa zone économique exclusive. Le texte de Montego Bay prévoit qu'une petite île (avec des habitants et une activité économique) suffise pour générer autour d'elle une zone économique exclusive. C'est pourquoi la Chine ou le Japon tentent de mettre la main sur des îles isolées en mer de Chine, et les aménagent pour affirmer leur souveraineté sur la mer.
Actuellement, la question de l'appropriation des eaux glaciales, notamment en Arctique, devrait amener à de nouvelles redéfinitions du droit international, car le réchauffement climatique rend accessible des nouvelles ressources.