Tracer des frontières, approche géopolitique

Le plus important en quelques mots

La frontière apparaît comme une démarcation administrative entre les pays. Elle permet de délimiter les espaces, les pays. Ces frontières sont parfois parfaitement matérialisées, mais parfois à imaginer. Dans cette leçon, tu vas voir comment on trace les frontières, et comment celles-ci peuvent être remises en cause.

Les frontières dans le monde aujourd'hui

La construction de nouveaux États

Une frontière permet de délimiter un pays, un État. Au fur et à mesure de l'histoire, les frontières évoluent. Dans la période récente, la chute de l'URSS en 1991, liée également à la chute du mur de Berlin en 1989, donne lieu à la création de nouveaux pays. Il faut donc délimiter ces nouveaux espaces. Dans ce cas précis, les frontières se jouent par négociation, et les traités attestent de ces nouveaux territoires. Dans d'autres cas, les frontières évoluent par la guerre (indépendance d'une partie d'un pays, annexion d'un territoire voisin...).

La colonisation, et surtout la décolonisation après la Seconde Guerre mondiale, donne également lieu à un nouveau dessin des cartes, avec des pays qui se structurent indépendamment.

Des frontières matérialisées ?

Lorsque tu te rends dans un autre pays, il est possible de franchir une douane. Il s'agit d'un point de passage qui permet de traverser une frontière. Dans le cas de l'Union européenne, les frontières sont peu matérialisées. Elles sont géographiquement précises, mais rien ne permet de les voir à l'œil !

Dans d'autres cas, des éléments naturels peuvent servir de frontière "naturelle" : le Rhin sépare, sur une partie de la frontière, l'Allemagne et la France. Des mers ou des montagnes servent de point de repère pour les frontières entre deux États. La question de la mer est importante car elle met en cause un droit de la mer incomplet, pour délimiter clairement la zone d'influence des pays.

Exemple

Entre la France et la Grande-Bretagne, les drames humains liés aux migrants qui traversent la Manche mettent en cause la question de la responsabilité des deux pays : qui est le responsable des mers, et jusqu'où ? Où se situe réellement la démarcation ?

Dans un cadre de repli sur soi, certains pays évoquent la construction de murs pour matérialiser la frontière, et ainsi la rendre difficilement franchissable. Le mur entre les Etats-Unis et le Mexique a été médiatisé avec le mandat de Donald Trump, tandis qu'en Europe certains dirigeants évoquent la construction d'un mur pour clôturer l'espace Schengen : un chantier difficilement réalisable.

Des projets transfrontaliers nombreux

Les projets internationaux, notamment en termes d'infrastructures, tendent à gommer la frontière dans son sens traditionnel. Aujourd'hui, les lignes de chemin de fer internationales font totalement oublier le franchissement d'un État à un autre. Des partenariats sont également mis en place pour faciliter les échanges entre pays dans les zones frontalières, notamment sur le plan économique.

Exemple

Le statut de travailleur frontalier pour les Français travaillant en Suisse.

Dans les transports, les douanes sont parfois anticipées. Les aéroports font d'ailleurs l'objet de statuts particuliers, puisqu'ils sont des points de passage de frontière, mais parfois très loin de la frontière exacte ! On passe donc la douane dans l'aéroport, avant même d'entrer dans un nouveau pays.

Jalon 1 : Tracer des frontières pour se protéger : le limes rhénan

Une frontière de protection…

Le limes est le nom donné à la frontière qui entoure l'empire romain à l'Antiquité. Principale puissance de l'époque, l'empire Romain cherche à protéger son territoire en fortifiant sa frontière. Des travaux s'étalent de l'an 83 à 260 pour protéger les frontières et ainsi empêcher l'ennemi de pénétrer sur le territoire de l'empire romain. Cette frontière est évidemment évolutive, au rythme des conquêtes toujours nombreuses de l'empire romain. Le long du limes, des camps de légionnaires se tiennent prêts à intervenir pour défendre la frontière.

...et d'échanges

L'Empire romain doit néanmoins commercer avec ses voisins, ses partenaires. Autour du limes se développe donc des espaces transfrontaliers qui permettent d'accueillir les marchands, toujours sous le contrôle de l'armée. Les échanges notamment avec le peuple germain, s'ils peuvent paraître sous haut contrôle, témoignent malgré tout d'une volonté de l'empire romain de protéger leurs frontières sans remettre en cause la coopération avec ses voisins.

Jalon 2 : Tracer des frontières pour se partager des territoires : le partage de l'Afrique

Territoire convoité au XIXᵉ siècle et théâtre de conquêtes coloniales, le partage de l'Afrique a subi de nombreux rebondissements.

Une conquête coloniale désorganisée

Au XIXᵉ siècle, les puissances européennes convoitent les ressources, notamment en matières premières, de l'Afrique. S'instaure alors une course aux colonies qui vise à mettre la main sur des territoires toujours plus nombreux, mais difficilement découpés. L'Afrique est partagée en colonies, mais pas en pays administratifs. Les explorations successives tendent à brouiller encore davantage les frontières, qui sont alors en constant mouvement.

La conférence de Berlin, une tentative de partage de l'Afrique

En 1884 et 1885, les puissances européennes se retrouvent unilatéralement (les civilisations africaines ne sont pas invitées) pour organiser le partage de l'Afrique. Il s'agit de se partager les territoires pour mettre fin à la course aux colonies. Avec la création de frontières, chaque pays disposera d'une partie de l'Afrique, et devra donc en assurer le "protectorat", c'est-à-dire l'organisation des échanges. La conférence de Berlin vise d'ailleurs, malgré les frontières, à multiplier les échanges commerciaux pour tirer pleinement profit (au sens européen du terme !) de la colonisation du continent.

Malgré ces négociations, de nouveaux incidents diplomatiques persistent, comme la crise de Fachoda en 1898, qui oppose la France et la Grande-Bretagne revendiquant chacun une partie du Soudan.

Jalon 3 : Tracer des frontières pour séparer deux systèmes politiques : les deux Corées

Une frontière historique

La Corée du Nord et la Corée du Sud naissent de la guerre de Corée, qui s'étale de 1950 à 1953. Elle est l'un des principaux conflits de la guerre froide, chaque Corée étant soutenu par un bloc (celui de l'URSS et celui des États-Unis). À l'issue de la guerre, le 38ᵉ parallèle est désigné comme frontière entre les deux Corées, et devient l'un des symboles d'un monde bipolaire. Le franchissement de la frontière devient extrêmement difficile, séparant des familles ou des proches pour de longues années. Aujourd'hui, la frontière est toujours infranchissable pour les citoyens : plus d'un million de soldats y patrouillent (deux tiers pour la Corée du Nord, un tiers pour la Corée du Sud).

Une barrière politique et idéologique

La Corée du Nord, déjà initialement soutenue par l'URSS, transforme peu à peu son modèle communiste en un modèle particulièrement autoritaire. On parle aujourd'hui de dictature populaire pour caractériser le régime de Kim Jong-Un. La Corée du Nord est l'un des seuls pays où la communauté internationale ignore ce qui s'y passe. Sur les cartes, la Corée du Nord manque de données.

Exemple

Il est difficile d'en analyser le développement humain.

La Corée du Sud a abordé un tournant plus libéral. Le pays participe aux échanges commerciaux internationaux, et trouve également sa place dans le soft power, avec la production de séries (influence culturelle), et en accueillant des événements sportifs internationaux (Jeux Olympiques d'Hiver en 2018).