Droit de vote en France au XIXe siècle
Le plus important en quelques mots
Dans ce résumé, tu vas découvrir les évolutions du droit de vote au XIXᵉ siècle, rythmées par des avancées et des reculs. Entre 1815 et 1870 se succèdent une monarchie, une république et un empire. Ces différents régimes sollicitent le peuple de diverses manières, selon que l'on souhaite suivre ou non l'opinion d'une partie plus ou moins importante de la population. Or, si les conditions d'accès au vote (âge légal, obligation ou non de payer un impôt) évoluent au cours de cette période, une frange entière de la population reste exclue du suffrage : les femmes.
Voter sous la monarchie (1815-1848)
La Restauration et le suffrage censitaire masculin (1815-1824)
En 1815, la monarchie est restaurée : Louis XVIII, frère de Louis XVI, monte sur le trône. Le monarque met en place un suffrage censitaire masculin, c'est-à-dire un droit de vote accordé aux hommes majeurs en capacité de payer un impôt : le cens. De plus, l'âge légal pour voter est fixé à 30 ans. Finalement, le droit de vote concerne moins de 0,5 % de la population française.
Charles X, adversaire du droit de vote (1824-1830)
En 1824, Charles X succède à son frère Louis XVIII. Il souhaite affirmer son pouvoir et, pour cela, il revient sur certains symboles de la Révolution. Quoi de mieux que de réduire les droits des citoyens ! Charles X prend des décisions en ce sens : il tente d'augmenter le cens et de censurer la presse. La population y répond par un soulèvement populaire les 27, 28 et 29 juillet 1830. Cet évènement prend le nom de "Trois Glorieuses".
Marianne guidant le peuple
Heurs et malheurs du suffrage censitaire masculin sous la monarchie de Juillet (1830-1848)
En 1830, Louis-Philippe Iᵉʳ succède à Charles X. Il abaisse le cens et il diminue l'âge de la majorité à 25 ans, pour que le nombre d'électeurs double.
Dans la perspective d'ouvrir le droit de vote au plus grand nombre, le camp des républicains est favorable à un abaissement plus important du cens. Louis-Philippe Iᵉʳ n'y est pas favorable : il cherche à faire taire ses opposants et interdit les réunions des républicains. Ces dernières, plus connues sous le nom de "campagne des banquets", désignent une série de réunions organisées dans tout l’hexagone entre 1847 et 1848 pour demander un élargissement du corps électoral et s'opposer aux décisions conservatrices du gouvernement. Une nouvelle révolution éclate et chasse le roi du trône en 1848.
Voter sous la IIᵉ République (1848-1852)
Le suffrage universel masculin
En mars 1848, la IIᵉ République rétablit le suffrage universel masculin. Désormais, le droit de vote n'est plus réservé à ceux qui ont les moyens de payer l'impôt.
Les femmes, grandes exclues du suffrage "universel"
Comme son nom l'indique, les femmes sont exclues du suffrage universel masculin. Pourtant, elles manifestent en ce sens, notamment via la distribution de tracts prônant le droit de vote des femmes. Elles se réunissent dans des clubs à partir de mars 1848. Il s'agit d'associations dont les membres débattent de questions politiques. Ces réunions leur sont rapidement interdites à partir de juillet de la même année.
Plusieurs femmes sont célèbres pour leur combat en faveur du droit de vote des femmes. C'est le cas de Jeanne Deroin (1805-1894), journaliste et socialiste qui réclame l'égalité politique et un suffrage véritablement universel. Elle se présente aux élections législatives de 1849. C'est également le cas de George Sand (1804-1876), femme de lettres française engagée dans la vie politique. Divorcée, elle refusa de se remarier. Mais, la société du XIXᵉ siècle considère que la place des femmes est à la maison, auprès des enfants et des tâches domestiques.
Comment exclure les citoyens du vote sans toucher au suffrage universel
En décembre 1848, près de 10 millions d'électeurs sont appelés aux urnes. Ils élisent massivement Louis-Napoléon Bonaparte, candidat de l'ordre et de l'autorité, à la présidence de la République.
En mai 1850, les conservateurs au pouvoir restreignent le droit de vote : il est désormais nécessaire de résider trois années d'affilée au même endroit pour pouvoir voter. Il en résulte qu'un tiers des électeurs ne peuvent plus voter. Pour un gouvernement, même démocratique, il est toujours possible de restreindre le droit de vote. En 2021, dans 18 États d'Amérique du Nord, 30 lois ont été votées pour restreindre l'accès au vote. Ces restrictions touchent majoritairement les personnes les plus pauvres ou isolées, les noirs américains et les latinos américains.
Représentation de Victor Hugo
Victor Hugo (1802-1885) s'oppose à ces restrictions. Élu député parisien en 1848, il siège dans un premier temps auprès des conservateurs. Il prend ces distances en 1850 et défend le suffrage universel.
Les plébiscites
Souhaitant rester au pouvoir, Louis-Napoléon Bonaparte organise un coup d’État en décembre 1851. Il restaure le suffrage universel masculin et utilise les plébiscites pour faire valider ses décisions par le peuple.
Dans l'histoire politique française, le plébiscite a une connotation très négative : il est associé au césarisme et au bonapartisme, et il désigne une forme de référendum marqué par un biais robuste en faveur du pouvoir en place, une forme de référendum assez peu démocratique ou très démagogique. Le peuple est fortement influencé : le résultat d'un plébiscite est en principe extrêmement favorable au pouvoir en place. Ainsi, lors du plébiscite de 1851, le "oui" l'emporte à 92,03 % contre 7,96 % pour le "non".
Voter sous le Second Empire (1852-1870)
En novembre 1852, Louis-Napoléon Bonaparte organise donc un plébiscite pour un retour à l'Empire. Le oui l'emporte et, le 2 décembre 1852, Louis-Napoléon Bonaparte devient l'empereur Napoléon III. Il maintient le suffrage universel masculin, mais en change de nombreuses règles afin de s'assurer les pleins pouvoirs. Ainsi, les candidats aux élections sont désormais nommés par l’État et les députés n'ont d'autres pouvoirs que d'entériner les décisions de l'empereur. Ce dernier a fréquemment recours aux plébiscites pour valider sa politique.
Portrait de Napoléon III.
À retenir
Dates
1815 : Restauration de la monarchie. Intronisation de Louis XVIII (1755-1814-1824).
27, 28 et 29 juillet 1830 : révolution des Trois Glorieuses.
Mars 1848 : mise en place du suffrage universel masculin et ouverture des clubs féminins.
Mai 1850 : les conservateurs au pouvoir restreignent le droit de vote.
2 décembre 1852 : Louis-Napoléon Bonaparte devient l'empereur Napoléon III.
Définitions
Bonapartisme : courant politique favorable au régime impérial ou variante du césarisme.
Cens : impôt.
Césarisme : forme de dictature où le dictateur s'appuie sur le peuple par le biais de votations, de référendums ou de plébiscites pour valider ses décisions.
Démagogique : se dit d'un personnage politique ou d'un discours, d'une rhétorique politique qui influencent le détenteur du pouvoir (par exemple, le peuple) en recourant à des discours, des idées ou des affirmations, mêmes fausses, qui le flattent ou le satisfassent.
Plébiscite : référendum, vote lors duquel les électeurs répondent à une question par oui ou par non afin de légitimer une décision.
Suffrage censitaire masculin : droit de vote accordé aux hommes majeurs en capacité de payer le cens.
Suffrage universel masculin : droit de vote accordé à tous les hommes majeurs.
Personnages
Louis XVIII (1755-1824) : roi des Français de 1815 à 1824.
Charles X (1757-1836) : roi des Français de 1824 à 1830.
Louis-Philippe Ier (1773-1850) : roi des Français de 1830 à 1848.
Jeanne Deroin (1805-1894) : journaliste et socialiste française.
George Sand (1804-1876) : femme de lettres française.
Victor Hugo (1802-1885) : écrivain, poète, romancier et dramaturge français.